La Vallée de la Markha est un des plus beaux treks du Ladakh. 6 jours (du 21 au 26 aôut 2015) et 2 cols à 5000m à travers un paysage minéral déchiqueté où je passerai mes nuits chez les quelques habitants des hameaux pittoresques de la vallée. Voici le récit de cette aventure.
Cet article est un carnet de voyage du trek de la vallée de la Markha. Pour organiser votre trek, c’est par ici 🙂
Sommaire de cet article :
- Markha Jour 1 – Zingchen à Yurutse (4000m)
- Markha Jour 2 – Yurutse à Skiu via Ganda La (4970m)
- Markha Jour 3 – Skiu à Markha (3700m)
- Markha Jour 4 – Markha à Hankar (3900m)
- Markha Jour 5 – Hankar à Nimaling (4700m)
- Markha Jour 6 – Nimaling à Shang Sumdo via Kangmaru La (5200m)
- Bilan de ce trek de 6 jours
- Budget et infos pratiques
Markha Jour 1 – Zingchen à Yurutse (4000m)
+700m, 4h de marche
Départ de Zingchen, vers 3360m, où je croise quelques groupes équipés de chevaux. Le taxi nous dépose, chacun avec son sac. Le guide ladakhi n’est pas un porteur. Le sac est de toute manière très léger, seulement quelques affaires, pas de couchage car je serai chez l’habitant.
La piste monte gentiment jusqu’à atteindre un petit campement. A l’est, le chemin continue vers le col de Stok et le « baby trek ». Nous allons au Sud, vers le col de Ganda La.
Nous nous arrêtons prendre un thé. Une étagère expose des petites peluches en laine de Yak. Productions locales. Un homme arrive, se prend deux traits d’un alcool local, fume une cigarette, et repars avec ses chevaux.
La route se réduit maintenant à un petit sentier, qui serpente entre les gorges rocheuses bariolées, alternance de rouge brique et de vert bouteille. L’ascension s’accentue. Nous sommes au delà de 3700m (à peine !) et la rareté de l’oxygène commence à faire son effet. Mon rythme cardiaque ne descend plus en dessous de 100 bpm. Le souffle est court. Pas pour mon guide.
Tenzin, pars un peu en avant pour réserver une chambre au village de Yurutse. Pas vraiment un village, une maison.
Nous atteignons Yurutse, 4000m. Il est 13h30. Déjà une dizaine de touristes arpentent les environs, et presque autant de guides. Tous dormiront dans le « village ».
La maison de Yurutse est aménagée de la même façon que les lodges népalais, en beaucoup plus rustique. Dans les chambres, le sol est en terre battue, recouvert d’une paillasse, le matelas posé dessus. Une grande salle fait office de salle à manger.
Les toilettes se résument à un trou dans le sol. Un moine semble habiter ici, bien qu’il n’y ait pas de monastère dans les environs. Autour de la maison, des champs de blé en terrasse, que travaille la tenancière des lieux, une dame sans âge, au visage buriné par la dureté du climat.
On nous offre un thé, et je pars pour une petite sieste. A cette altitude, je m’attendais à avoir un peu froid, même en journée. Mais non. Le soleil faisant son office, la température ne commençe à descendre qu’à partir de 17h. Vers 18h, à la nuit tombée, il ne fait plus que 5°C.
Il est évidemment hors de question de prendre la moindre douche car il n’y a pas d’eau courante. La paire de chaussette tiendra bien un jour de plus.
L’heure du dîner approchant, l’air s’emplit d’une appétissante fragrance de viande grillée et de bouillon de légume.
Ayant passé deux nuits inexistantes à cause de maux de tête lancinants (après analyse, ce sont les vapeurs de fioul générées par le fonctionnement en quasi-continu des groupes électrogènes des hôtels de Leh 3 jours durants, à cause de pannes de courant, qui ont généré ces maux de têtes), et n’ayant pas envie d’en passer une troisième, je décide de prendre un demi-diamox préventif.
Le dîner arrive enfin. Sorte de bouillon de légume en guise de soupe, suivi d’un plat de riz, lentilles et légumes au curry, qui n’est pas sans rappeler le mythique dal bhat népalais. Excellent.
A 19h, nous serons 20 marcheurs, hors guides. Le gîte ne pouvant accueillir tout ce monde, quelques uns iront dormir sous des tentes, tandis que les plus veinards occuperont la salle à manger.
Markha Jour 2 – Yurutse à Skiu via Ganda La (4970m)
+ 970m – 1700m, 8h30 de marche
Départ à 8h, après un petit déjeuner à base de chapatis-confiture.
L’ascension du col de Ganda La suit un petit sentier, peu escarpé. A chaque replat succède une nouvelle colline, tant est si bien que l’on ressent l’amère sensation de ne jamais arriver au bout. Le guide avance tranquillement alors que je peine à le suivre, le souffle court. Au bout d’une d’heure d’ascension, il commence à pleuvoir à verse…
Vers le col de Ganda La (4900m)
Vers 4500m, la pluie se transforme en petits grêlons. Nous atteignons le col de Ganda La vers 11h, après 3h d’ascension infernale. Le col en soi n’a rien d’exceptionnel, si ce n’est sa vue, mais à vrai dire sous la grêle on ne voit pas à 10m. Donc on continue, et on ne traîne pas.
La descente sous la neige est chaotique, au pas de course. Le paysage est somptueux. Sous une pluie battante, nous traversons le village de Chingo, puis progressons entre des murailles de roches torturées, ocres et vertes. Le chemin a disparu par endroit, arraché par les pluies torrentielles du mois d’août qui ont raviné encore davantage le lit du cours d’eau. Cours d’eau que nous avons déjà franchi une trentaine de fois.
Le « sentier » est un lit de rivière, un enfer de caillasse où chaque pas mal assuré peut te fouler une cheville. L’entrée du village de Skiu marque la fin de ce calvaire.
Alors bon je rouspète sur le temps dégueulasse et le sentier exécrable, mais il faut bien se rendre compte que les paysages que l’on traverse sont juste irréels, d’une beauté à couper le souffle. Des falaises incroyables, des absurdités géologiques, sorties de nulle part, tel un chaos rocheux venu d’une planète hostile.
A Skiu, nous dormons chez l’habitant, où nous serons cette fois-ci les seuls clients. Quelques touristes israéliens sont arrivé peu après, en négociant de manière tellement agressive que notre hôte les a mis dehors. Au soir, soupe et d’excellents momos maison.
Markha Jour 3 – Skiu à Markha (3700m)
+ 400m, 8h de marche
Nous quittons Skiu après un petit déjeuner chapati-confiture, pour changer. Le chemin, lorsqu’il suit la rivière, est plat et tranquille. Il nous faut à plusieurs reprises gravir les rives abruptes en terrasses de la rivière, à cause du chemin détruit par les inondations. Nous franchissons la rivière à plusieurs reprises, de l’eau jusqu’au genoux. Inutile de préciser, mais l’eau est glacée.
Nous sommes maintenant dans le creux de la vallée de Markha. Endroit absolument magique, au delà des superlatifs. Les couleurs surtout. L’ocre des roches, rouge, parfois violet, contraste avec le vert des quelques arbres de la vallées. Les falaises semblent comme arrachées à la Terre. Aucune herbe ne pousse si ce n’est dans le lit de la rivière, autour de quelques champs cultivés.
Vallée de la Markha
Vallée de la Markha
Tout aurait pu aller pour le mieux, si je n’avais pas eu la bonne idée de rendre mon déjeuner. 2 fois. Et dans cet endroit perdu au milieu de rien, on ne peut pas faire le timoré, il faut avancer.
Nous arrivons à Markha, charmant village parfaitement scénique, construit sur un éperon rocheux, à la limite de la déshydratation, rien dans le ventre et complètement épuisé. Il est 16h30.
Tenzin se plie en 4 pour m’apporter toute son aide, notamment aller qu’au village voisin pour me trouver quelque chose que je pourrais avaler, des fruits notamment. Il revient avec 3 bananes et un melon d’eau.
Je m’essaie au repas, soupe et dal bhat. Sans succès. J’engloutis deux des trois bananes, en guise de repas. La nuit sera ponctuée de cauchemars de situations catastrophiques, l’altitude n’aidant pas à trouver un sommeil réparateur.
Markha Jour 4 – Markha à Hankar (3900m)
+ 200m, 4h de marche
Petite journée, où nous progressons toujours le long de la rivière Markha. Le paysage est le même qu’hier, comprendre aussi magique quoiqu’un peu répétitif. Le sentier dans le de la rivière alterne entre sable et grosses pierres. En chemin, nous croisons des petites dames qui tricotent tout en marchant.
Nous atteignons Hankar, pour la pause déjeuner. Quelques maisons adossée à la falaise, entourés de champs de blé et d’orge forment le village. De la vallée, on aperçoit le majestueux Kangyatse, le plus haut sommet de la région (6400m), avec son sommet enneigé. Au delà du village, la vallée se réduit à un torrent.
La maison est plus rustique que les précédentes. Un cloporte se ballade allègrement sur l’oreiller. Les « couettes » ont gardé une odeur de vieux tissu poussiéreux. Dehors, le vent comment à forcir. La nuit sera fraîche. Par acquis de conscience, je rajoute une « couette », on ne sait jamais.
Moment d’exception : je suis invité à prendre le dîner dans la cuisine, et partager ainsi le quotidien d’une famille ladakhi. Tour à tour arriverons le professeur du village, le vénérable grand-père à l’âge très honorable de 82 ans, et deux indiens. Chacun amène son lot de conversations passionnantes, empruntes de sa culture et de son expérience propre, faisant de ces moments l’essence même de ce voyage. Ce que je suis venu cherché ici.
Homme vénérable de 82 ans, village de Hankar
Brasero de rituel
Markha Jour 5 – Hankar à Nimaling (4700m)
+800m, 5h30 de marche
Le sentier serpente entre les falaises rocheuses, puis quitte définitivement la vallée pour démarrer une terrible ascension. Hankar est rapidement hors de vue, alors que le Kangyaste, imposant, empli l’horizon.
Village de Tchachungtse (4150m)
Le chemin ardu traverse Tchachungtse, puis un étang bleuté entouré de petits cairns qui marque l’arrivée sur un plateau. On croise quelques pikas (oui comme pikachu…), sorte d’hybride entre un lapin et un gros rat.
Nimaling se trouve au milieu d’un vaste prairie, dans un creux de vallée évasé. Le campement en lui-même est composé d’une trentaine de tente Quechua, parqué dans un enclos, autour d’une tente parachute. Au delà, quelques groupes, avec porteurs, ont installé leurs bivouacs. Vaches, veaux et mules broutent tranquillement dans les alentours.
De l’autre côté de la rivière est installé un camp de nomades. En fait de nomades, ce sont 7-8 personnes des villages de la vallée (Hankar, Markha, Humla, Sara,…) qui restent ici pour la période estivale, y faire brouter leurs bêtes, et préparer notamment du fromage et des yaourts. L’hiver, ils redescendent au village, voire de plus en plus souvent à Leh, profiter du confort de la plaine.
Le fromage est disposé sur de grand tissus pour sécher au soleil. Un fromage fait de mélange de lait de vache, de chèvre et de yak, plus ou moins sucré, mais jamais salé. Nous restons avec Tenzin, profiter du paysage, en tentant tant bien que mal d’éloigner les oiseaux, amateurs de fromage, un peu trop téméraires.
Vient un berger, amenant brouter son troupeau dans la prairie. Sans le savoir, il ajoute ainsi une petite touche de charme bucolique à cet endroit paisible et hors du temps.
Bergère nomade, camp de Nimaling
La nuit tombe vers 18h, et d’un coup la température agréable de l’après-midi fait place à un froid glacial. Je m’endors sous la la triple couette de ma tente Décathlon.
Markha Jour 6 – Nimaling à Shang Sumdo via Kangmaru La (5200m)
+500m -1550m, 7h30 de marche
Au petit matin, la tente est recouverte de givre, et le petit ruisseau qui traverse la plaine est en partie gelé. Températures négatives. Sans sac de couchage, mais avec doudoune et couette, ça a tenu. Aujourd’hui, aucun nuage ne couvre le ciel azur. Le passage de ce col sera, je l’espère, plus agréable que le premier.
Nous quittons le camp pour démarrer un sentier ardu qui monte à flanc de vallée, et nous fait quitter définitivement la Markha. La trace se calme un peu, puis remonte sévèrement sur les derniers 200m de dénivelé, jusqu’au col de Kongmaru La, 5200m, point culminant de ce trek. Le panorama est superbe. Au sud, toujours le Kangyaste (6400m) et son double sommet enneigé. Au nord, la chaîne des Stoks et ses montagnes bariolées.
Commence alors 5h d’une descente infernale pour les genoux, entre sentier escarpé et lit de rivière. Frustrant car tes yeux doivent être constamment rivé sur tes pieds pour te fouler une cheville ou pire, tomber dans le ravin. Dommage, car la vallée est une merveille géologique. Des flancs écharpés, des lames de roches verticales et saillantes, qui découpent la vallée en un patchwork de verts et de violets.
15h30, apparaît le village de Shang Sumdo, salutaire, après 6 jours ereintant mais absolument magiques.
Bilan de ce trek de 6 jours
Ce qu’on a aimé
- L’isolement de la vallée. La vallée de la Markha, malgré sa relative proximité par rapport à Lah (30min en voiture), se trouve totalement isolée de l’extérieur. On y accède via un col à 4900m ou via Chilling, par une route extrêmement dangereuse qui suit la rivière Zanskar.
- Les nuits chez l’habitant. C’est l’occasion de vivre le quotidien des gens de la vallée. On mange ce qu’ils mangent, on dort dans le même confort. C’est véritablement spartiate, mais c’est réellement authentique.
- Les rencontres. La dame qui faisait sécher son fromage de brebis au soleil et qui chassait les corbeaux à coup de pierre, le vénérable vieillard dont la seule présence dans le petit village de Hankar a imposé d’elle-même le respect, la petit fille de Skiu. Tant de petite rencontres improbables et néanmoins quotidienne font de ce trek une immersion dans une autre époque.
Ce qu’on a moins aimé
- La fréquentation. Relativement connu et don fréquenté, ce n’est pas tant le monde que le type de fréquentation. Pas vraiment éduqué ni vraiement polis, les « touristes » que l’on rencontre sur le trek ne sont pas tous animés du même esprit et c’est bien dommage.
- L’absence de vrais sommets. Autant la vallée de la Markha est écharpée aux flancs particulièrement colorés, autant arrivé au col on regrette un peu un horizon pointant sur des sommets véritables. C’est n’est pas l’Himalaya, et malgré les neiges du Stok Kangri et du Kang Yatse qui brillent, les montagnes du Ladakh restent moins impressionnantes que celles du Népal.
Ce qu’on aurait pu faire mieux
- Continuer sur Stok Kangri. Il aurait fallu 5 ou 6 jours de plus, et un peu d’organisation. Dommage car depuis 2019 ce sommet « facile » de 6000m est interdit (temporairement d’accès).
- Prendre le temps. C’est une constante, mais finalement, 5 jours dans la vallée, c’est peu, et on pourrait très bien passer plus de temps, vivre au rythme des habitants, séjourner dans chacun des villages,…
Budget et infos pratiques
Comment rejoindre la vallée de la Markha ?
Pour rejoindre Zingchen, le plus simple est de prendre un taxi depuis le centre de Leh, ou de demander à votre hotel de le réserver pour le lendemain.
Si vous partez avec un guide, il peut le réserver pour vous deux.
Le trajet Leh – Zingchen revient à environ 2000 Rs (25€)
Le retour Shang Sumdo – Leh coûte 2500 RS (30€)
Dans les 2 cas, vous pouvez prendre un shared taxi. La somme sera alors à diviser par le nombre de passager.
Le tarif des taxis est reglementé et disponible ici
Quel budget ?
Outre le taxi (3500 Rs), il faut compter :
- les nuits chez l’habitant : 700 Rs (9€)
- les repas chez l’habitant ou en tente : 300 Rs (5€)
- Le guide éventuellement : 1800 Rs / jour (20€/jour)
- Le pourboire de fin de trek : 10% du prix du guide, soit 1080 Rs pour la vallée de la Markha (14€)
Sac et liste de matériel :
Pour ce trek de la vallée de la Markha, pas besoin de matériel de bivouac, vous serez chez l’habitant et sous tente aménagée à Nimaling.
Je suis parti avec un petit sac de 6 kg comprenant :
- Sac de couchage -10°C
- Haut thermique
- lot de 3 sous-vêtements (boxer + chaussettes)
- 1 t-shirt merino
- doudoune
- bonnet
- écharpe
- paire de gants
- Frontale
- Couteau
- Hygiène : PQ, sac poubelle, brosse à dent, dentifrice, 1 savon
- Quelques barres céréales
- Sur moi : 2 bâtons de rando, polaire, chaussures de haute randonnée
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